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Pauline Minier

Diplômée en 2015 à Nantes du collège Ostéopathique Sutherland.

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François LEJEUNE

Osteopathe DO MROF - Secrétaire général adjoint chez registre des ostéopathes de France

Mieux comprendre le sommeil des bébés en 7 points clés

« Bébé fait-il ses nuits ? »

C’est incontestablement la question la plus posée aux nouveaux parents, qui peuvent même ressentir une sorte de pression si la réponse est non. Se sentir jugés de ne pas être de bons parents, puisqu’ils n’ont pas « réussi à apprendre à leur bébé à dormir », ou que visiblement leur bébé a un « trouble du sommeil ». Si de véritables troubles du sommeil existent (causés par exemple par une intolérance alimentaire, du reflux, une douleur…) et nécessitent  une consultation, 9 fois sur 10, il n’en est rien.

Cet article a pour but de mieux faire comprendre pourquoi nos bébés se réveillent la nuit, afin d’ôter cette pression inutile. Car oui, il est tout à fait normal et sain pour les bébés de se réveiller la nuit !

Commençons par quelques chiffres. Une étude finlandaise faite en 1990 sur 270 bébés âgés de 0 à 12 mois donnait les résultats suivants :

– jusqu’à 3 mois : 90 % se réveillaient la nuit
– entre 3 et 5 mois : près des trois-quarts
– entre 6 et 8 mois : les deux-tiers
– entre 9 et 12 mois : 47 %

Alors, pourquoi tant de bébés se réveillent la nuit ? Tout simplement parce que cela correspond à un besoin physiologique.

Le sommeil des bébés est vraiment différent de celui des adultes. Comprendre ces différences aide vraiment à mieux accepter les réveils nocturnes.

  1. LE BÉBÉ A BESOIN DE SE NOURRIR LA NUIT

Et encore plus particulièrement les tous premiers mois où il tète toutes les 2-3 heures, jour comme nuit. Son estomac étant encore tout petit, il se nourrit peu à la fois mais souvent. De manière générale, les spécialistes disent pour sa croissance et son développement, le bébé a en moyenne besoin d’une à deux tétées nutritives par nuit jusqu’à l’âge de 9 mois environ. Mais certains peuvent avoir encore besoin de se nourrir la nuit passé cet âge. De plus, les tétées nocturnes sont particulièrement bénéfiques pour sa croissance. En effet, le lait maternel est disponible en plus grande quantité la nuit, et le réflexe d’éjection plus puissant, ce qui donnerait un lait plus riche en matières grasses, et donc en calories. Les bébés qui tètent fréquemment pendant la nuit ont donc tendance à mieux grandir et mieux grossir.

  1. LE NOUVEAU-NÉ N’A PAS ENCORE D’ORGANISATION CIRCADIENNE

C’est-à-dire qu’il ne fait aucune différence entre le jour et la nuit. Il dort beaucoup (18 heures par jour), mais par petites tranches. Vers 3-4 mois, il a généralement acquis une certaines notion du jour et de la nuit (ses périodes d’éveil s’allongent en journée et celles de sommeil s’allongent la nuit), mais l’organisation circadienne ne sera totalement finie qu’autour de 2 ans !

  1. LE BÉBÉ A UN PLUS GRAND BESOIN DE SOMMEIL ACTIF QUE L’ADULTE

Le sommeil se compose de deux phases principal : le sommeil actif (aussi appelé « sommeil paradoxal » ou « sommeil léger ») et le sommeil lent (aussi appelé « sommeil profond »). Le sommeil actif est celui durant lequel se produisent les rêves. Lors de cette phase de sommeil, les yeux bougent sous les paupières. En sommeil actif, le réveil est facile chez le bébé (c’est une phase « sensible »), alors qu’il est difficile chez l’adulte. Or le bébé a un plus grand besoin de sommeil actif que l’adulte : 50% à 60% de son sommeil à la naissance, contre 20% pour l’adulte. A partir de l’âge de trois mois, cette proportion diminue progressivement, mais ne sera au niveau de l’adulte que vers deux ou trois ans. Il est intéressant de savoir que plus un animal est évolué et son cerveau développé, plus sa proportion de sommeil actif est élevée. Chez l’humain, cette proportion diminue au fil de la vie (100% pour le fœtus, 50% à la naissance, 25% à deux ans, 20% pour les adultes, 15% pour les personnes âgées). Ainsi, c’est lorsque le cerveau connaît sa croissance la plus rapide que la proportion de sommeil actif est la plus élevée. Les experts estiment que le sommeil actif a une réelle influence sur le développement cérébral.

  1. LES CYCLES DE SOMMEIL DU BÉBÉ SON PLUS COURTS

Ainsi, au lieu de survenir environ toutes les deux heures comme chez l’adulte, le sommeil lent survient toutes heures. Puisque le passage du sommeil lent au sommeil actif est un moment fragile où l’on est susceptible de se réveiller, il y a plus de périodes « critiques » de réveil chez le bébé. Si un stimulus se produit lors de cette période transitionnelle (bruit, couche souillée, faim, douleur, rhume…), le bébé se réveillera.

  1. LE BÉBÉ NE S’ENDORT PAS COMME L’ADULTE

Lorsque l’adulte s’endort, il passe d’abord par une phase de sommeil lent d’environ 90 minutes. Il dort donc directement profondément. Le bébé lui, passe d’abord par une phase de sommeil actif d’environ 20 minutes, puis par une phase de sommeil transitionnel. Pendant ces phases, le moindre stimulus peut le réveiller, ce qui explique que beaucoup de bébés soient difficiles à déposer dans les premiers mois, difficiles à endormir… Il faut attendre qu’ils soient profondément endormis pour pouvoir les laisser. En grandissant, cette phase initiale disparaît et le bébé s’endort directement en sommeil lent. L’âge de ce changement varie d’un bébé à l’autre. Certains bébés franchissent cette étape dès 3 mois, mais pour d’autres c’est beaucoup plus long. Malgré tout, je pense que même passée cette phase, un bébé devrait être accompagné dans le sommeil (avec une tétée, une berceuse, des bercements, des caresses…), et non devoir absolument s’endormir seul, comme le prône notre culture. Le sommeil est une séparation effrayante pour le tout petit. Pour que son rapport au sommeil soit plus tard positif, ne devrions-nous pas l’accompagner en douceur pour qu’il s’y abandonne en se sentant en sécurité? C’est ce qui se fait dans à peu près toutes les cultures, sauf la culture occidentale.

  1. LES RÉVEILS NOCTURNES ONT UN EFFET PROTECTEUR CONTRE LE SYNDROME DE LA MORT SUBITE DU NOURRISSON

Le risque est présent jusqu’à 1 an, plus particulièrement entre 0 et 6 mois, avec un pic autour de 3 mois. Lors de ces premiers mois, la respiration du bébé est encore immature : elle est irrégulière, avec des épisodes d’apnée du sommeil. Le bébé est pourvu d’un réflexe protecteur qui l’aide à se réveiller en réaction à une apnée du sommeil qui le mettrait en danger. La mort subite du nourrisson serait la conséquence d’un mal-fonctionnement de ce réflexe : le bébé ne parvient pas à se réveiller lors d’un problème respiratoire. Le sommeil actif (léger donc) et les réveils fréquents protègent donc le bébé de cette tragédie. D’ailleurs, les bébés les plus à risque sont ceux qui dorment de manière ininterrompue très tôt, dès les premiers mois. Il faut alors être vigilent et bien les garder près de soit la nuit… De plus, la période la plus à risque (à l’âge de 3 mois) correspond justement au moment où beaucoup de bébé commencent à allonger leurs périodes de sommeil nocturne à un moment où les mécanismes cardio-respiratoires sont encore trop immatures. Il est bon de savoir que l’OMS recommande officiellement que le bébé dorme près de ses parents les 6 premiers mois de sa vie, car un bébé qui dort seul passe plus de temps en sommeil lent (profond donc) qu’il ne le devrait. Ses phases de sommeil ininterrompu sont donc plus longues, mais il est plus à risque !

  1. LE BÉBÉ A UN GRAND BESOIN DE CONTACTS PHYSIQUES

On considère que le petit humain né « prématuré » d’un an environ, si l’on compare son niveau de développement à la naissance avec les autres mammifères. A la naissance, le cerveau humain n’a que le quart de sa taille adulte, contre 45% pour le chimpanzé par exemple. La bipédie et la taille du cerveau expliquent cette prématurité : si le bébé humain naissait au même niveau de développement que les autres mammifères, il ne pourrait pas passer par le bassin de sa mère. Cette immaturité explique la grande dépendance et le grand besoin de contacts physique du bébé, et donc les réveils nocturnes. Il n’est pas prêt pour être seul toute la nuit, sans aucun contact. S’il était encore dans le ventre de sa mère, les contacts seraient permanents ! Ces contacts physiques fréquents (la nuit comme le jour d’ailleurs) lui procurent du bien-être, notamment car ils entraînent la sécrétion d’ocytocine, surnommée « l’hormone du bonheur ». Il a été montré que le contact en peau à peau entre la mère et son bébé pouvait réduire la production d’hormones de stress chez le bébé de 74% ! Or des taux élevés de ces hormones peuvent avoir un impact sur la digestion, la croissance, et même le développement cérébral et affectif. Les contacts physiques fréquents au contraire, favorisent le développement et contribuent également à développer le lien d’attachement parent-enfant et la sécurité affective du tout petit. Sentir que ses parents sont toujours là pour lui quand il en a besoin la nuit l’aidera à appréhender le sommeil sereinement plus tard, en confiance. Il est courant que des bébés qui faisaient leurs nuits se réveillent à nouveau fréquemment une fois que la maman reprend le travail. Cela illustre bien le fait que les réveils nocturnes peuvent-être simplement dus au besoin de proximité : dans ce cas précis, le bébé rattrape la nuit les contacts rapprochés qu’il n’a pas pu avoir avec sa maman pendant le jour.

Le sommeil du bébé mature avec le temps. Petit à petit, les cycles de sommeil s’allongent, la proportion de sommeil actif diminue, il y a donc moins de « périodes critiques de réveil ». Il va donc progressivement allonger ses périodes de sommeil nocturnes. ll faut cependant savoir qu’il s’agit là d’un processus discontinu : il peut y avoir une amélioration pendant quelques temps, puis à nouveau de nombreux réveils, puis une autre période d’amélioration… Je conseille de relativiser et de ne pas sauter de joie trop vite quand bébé commence à « faire ses nuits », pour éviter des frustrations  par la suite! Il n’est pas rare qu’un bébé qui « faisait ses nuits » vers 3 mois, se réveille à nouveau quelques semaines ou mois plus tard. Dans une étude portant sur un grand nombre de bébés, 70% « faisaient leurs nuits » (de minuit à cinq heures du matin) à 3 mois et 13% seulement à 6 mois. Mont P’tit Loup rentre d’ailleurs dans ce cas de figure : après avoir enchaîné des nuits de 7-8 heures pendant plusieurs semaines autour de ses 3 mois, s’est remis à se réveiller beaucoup plus souvent à partir de ses 4 mois. Les poussées dentaires (suffisamment douloureuses pour tirer les petits d’un sommeil profond) et les phases d’angoisse de séparation et de terreurs nocturnes sont des causes classiques de « régressions » des nuits chez les bébés plus âgés. Les nouvelles acquisitions aussi : le bébé « s’entraîne » dans son sommeil et cela le réveille (mon P’tit Loup est champion pour cela ! En ce moment, il rampe, se met à 4 pattes et se met assis en dormant…) De 1 à 3 ans, le sommeil est mieux structuré, mais certains enfants peuvent éprouver de la difficulté à dormir pour ces raisons. Une étude française de 1995 conclue même que « la proportion d’enfants qui recommencent à se réveiller la nuit augmente après 9 mois pour être à son maximum dans la deuxième année ».bébé marennes

QU’EN CONCLURE ?

Le bébé n’est tout simplement pas fait pour dormir toute la nuit. Si son sommeil est si léger, probablement pour lui permettre de détecter et communiquer ses besoins vitaux. S’il dormait aussi profondément que les adultes, il ne pourrait pas se réveiller pour signaler sa faim, le fait d’avoir trop chaud, le nez obstrué… Ce sommeil léger lui permet de se réveiller pour se protéger en cas d’arrêt respiratoire dangereux, et de plus il est bénéfique pour son développement cérébral. Les contacts rapprochés avec ses parents la nuit favorisent également le lien d’attachement et sa sécurité affective.

D’ailleurs, qu’appelle-t-on « faire ses nuits » ? Les experts du sommeil considèrent qu’un bébé « fait ses nuits » lorsqu’il dort de manière ininterrompue entre minuit et 5 heures du matin. On est loin de nos « nuits d’adultes » de huit heures ! Il convient donc d’avoir des attentes réalistes quant au sommeil de son bébé, ce qui aide vraiment à lâcher prise. S’attendre à ce que dès 2-3 mois, bébé dorme 10 heures d’affilée n’est absolument pas réaliste et ne fera que générer des frustrations ! Si certains bébés le font, c’est loin d’être la majorité, et cela ne devrait pas être considéré comme « la norme ». Et encore moins inciter à « dresser » les « récalcitrants » ! Un bébé n’a pas besoin de dormir 8-10 heures d’affilé pour être bien reposé. Si les parents peuvent faire certaines choses pour favoriser un sommeil paisible (telles que coucher le bébé aux premiers signes de fatigue, avoir une routine rassurante, un rituel du coucher, accompagner le bébé dans le sommeil…), il n’y a cependant aucune raison de culpabiliser parce que le bébé ne « fait pas encore ses nuits ». Au contraire, ces réveils lui sont bénéfiques. Le vrai problème est lié à la fatigue ressentie par les parents, pas au bébé. Plutôt que de vouloir absolument que le bébé dorme toute la nuit, peut-être y a-t-ils d’abord des aménagements à faire dans nos rythmes de vie pour être moins fatigués ? Comme par exemple, dormir près de son bébé pour pouvoir répondre rapidement à ses appels sans trop se réveiller, ne pas allumer de lumière trop forte au milieu de la nuit pour un rendormissement plus facile pour tout le monde, ne pas se coucher trop tard le soir, faire la sieste en même temps que son bébé si le besoin se fait ressentir… Ce n’est pas tant la fréquence des réveils qui fatigue, mais la durée de ces réveils. [Personnellement, en dormant avec mon P’tit Loup, je suis généralement bien reposée malgré qu’il tète encore plusieurs fois la plupart des nuit. Si je n’ai pas eu à me lever, je fais tout dans un demi-sommeil et cela n’impacte pas mon repos. Par contre s’il y a un réveil prolongé pour cause de douleur dentaire par exemple, ou même juste un changement de couche, là c’est la catastrophe le lendemain, je suis é-pui-sée !] Lorsque le bébé grandit, s’il continue de se réveiller fréquemment toutes les nuits et que les parents sont trop fatigués, il est possible de lui expliquer les choses. De bonnes idées sont à piocher dans le livre « Un sommeil paisible et sans pleurs » d’Elizabeth Pantley, pour réduire les réveils des parents avec bienveillance pour les bébés plus âgés/bambins. S’il est encore allaité et aime téter souvent la nuit, un sevrage nocturne en douceur peut-être envisagé. 

Un équilibre est à trouver pour respecter au mieux les besoins de toute la famille. Il y a de nombreuses solutions possibles.

Sources 

Mieux comprendre le sommeil des bébés en 7 points clés

A propos des cycles de sommeil :

Dr William Sears, Etre parent la nuit aussi, Ligue La Leche, 2006, p 34 à 42

Claude-Suzanne DidierJean-Jouveau, Partager le sommeil de son enfant, 2005, p17

A propos des études portant sur la fréquence de réveil des bébés :

Claude-Suzanne DidierJean-Jouveau, Partager le sommeil de son enfant, 2005, p15 à 18

Dr William Sears, Etre parent la nuit aussi, Ligue La Leche, 2006, p 40

A propos de l’allaitement nocturne : 

Dr William Sears, Etre parent la nuit aussi, Ligue La Leche, 2006, p 105

Elizabeth Pantley, Un sommeil paisible et sans pleurs, 2005, p 77

A propos de la mort subite du nourrisson :

Dr William Sears, Etre parent la nuit aussi, Ligue La Leche, 2006, p 179 à 189

Claude-Suzanne DidierJean-Jouveau, Partager le sommeil de son enfant, 2005, p 45 à 48

A propos du besoin de proximité, de l’attachement et de la sécurité affective : 

Dr William Sears, Etre parent la nuit aussi, Ligue La Leche, 2006, p 21 à 32 / p  21 à 32/ p 28-29/ p 50

Claude-Suzanne DidierJean-Jouveau, Partager le sommeil de son enfant, 2005, p 19 à 21 / p 42 à 44 / p 53 à 55

A propos des solutions douces pour réduire les réveils nocturnes chez les bébés plus âgés :

  • Pistes pour les bébés de plus de 18 mois (« livre du dodo », « tickets d’entrée-sortie », matelas au sol et autres astuces …)

Elizabeth Pantley, Un sommeil paisible et sans pleurs, 2005, p 205 à 212

  • Pour un sevrage nocturne :

– « Méthode Gordon » (bébé de plus de 12 mois): méthode décrite ici

– « Méthode Pantley » : Elizabeth Pantley, Un sommeil paisible et sans pleurs, 2005, p 200 à 204 / p175-176

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